Un conflit au travail est-il toujours du harcèlement moral ?
La réponse est non. Et c’est une confusion qui peut coûter cher aux organisations.
Quand une situation devient floue : un exemple immersif
Lors d’une réunion, un collaborateur prend systématiquement la parole pour dénigrer son collègue.
Moqueries devant l’équipe, remarques cinglantes, isolement volontaire dans les projets.
Peu à peu, la victime se tait, s’isole, perd confiance. Jusqu’au jour où un arrêt maladie pour burn-out est posé.
Ici, il ne s’agit pas d’un simple conflit. Nous sommes face à un harcèlement moral : une emprise asymétrique, répétée, qui dégrade la santé et la dignité d’un salarié.
Comprendre la différence : symétrie vs asymétrie
🔹 Le conflit :
Opposition symétrique entre deux personnes ou équipes.
Chacun défend ses intérêts, parfois avec force.
La relation peut être rééquilibrée.
🔹 Le harcèlement moral :
Relation asymétrique, marquée par une emprise.
Répétition d’actes hostiles visant à dégrader les conditions de travail.
La victime est fragilisée, souvent incapable de se défendre à armes égales.
La Cour de cassation (Cass. crim., 6 juin 2018, n°17-82.553) rappelle que :
le harcèlement moral n’exige ni intention de nuire, ni conflit préalable. Ce qui compte, c’est l’impact répété et délétère sur la santé et la dignité.
Pour aller plus loin : ANACT – Comprendre et prévenir le harcèlement moral.
Exemple inspiré d’une situation traitée
Dans une entreprise de services, la direction nous sollicite : deux responsables d’équipe s’opposent régulièrement, chacun accusant l’autre de harcèlement.
Les tensions sont fortes, les équipes se crispent, et le climat devient délétère.
L’enquête menée révèle une réalité différente :
Ce n’était pas du harcèlement, mais un conflit de pouvoir symétrique.
Deux personnalités affirmées, chacune campée sur ses positions.
La réponse adaptée n’était pas disciplinaire, mais une médiation encadrée.
Résultat : communication rétablie, règles de fonctionnement clarifiées, suspicion de harcèlement levée.
Cet exemple illustre bien que mal qualifier une situation, c’est risquer d’y apporter une mauvaise réponse.
Pourquoi la confusion est dangereuse ?
Sous-estimer un harcèlement réel
→ Le traiter comme un simple conflit revient à banaliser une atteinte grave à la santé mentale.
→ Risque : aggravation des RPS, responsabilité pénale de l’employeur.
Sur-réagir à un conflit ordinaire
→ L’assimiler à du harcèlement conduit à judiciariser inutilement la relation.
→ Risque : perte de crédibilité du dispositif interne, tensions accrues.
En clair : mal nommer la situation, c’est mal y répondre.
Deux réponses adaptées
👉 Face à un conflit : la médiation.
Restaurer la communication.
Clarifier les attentes et les règles.
Permettre aux parties de trouver une issue équitable.
Ressources utiles : INRS – Médiation et prévention des conflits.
Face à un harcèlement : l’enquête interne.
Recueillir les faits de manière impartiale.
Établir la matérialité et la répétition des agissements.
Déterminer les responsabilités et déclencher, si nécessaire, des sanctions disciplinaires.
Pour sécuriser l’approche : DARES – Études sur les risques psychosociaux.
Nommer juste, c’est déjà agir
Le conflit est une opposition qu’on peut gérer et transformer.
Le harcèlement est une atteinte qu’on doit stopper et sanctionner.
Un manager formé, un service RH outillé, une gouvernance vigilante : voilà ce qui permet de qualifier correctement la situation et d’apporter la bonne réponse.
Trois leviers pour sécuriser vos pratiques
Former les managers
Reconnaître les différences entre conflit et harcèlement.
Adopter les bons réflexes de prévention et d’alerte.
Structurer un protocole clair
Médiation interne ou externe pour les conflits.
Enquête interne rigoureuse pour les alertes harcèlement.
Renforcer la culture d’écoute
Encourager l’expression des désaccords.
Rassurer sur le traitement sérieux des signalements.
La posture Performance RH
Chez Performance RH, nous aidons les organisations à :
✔ Clarifier leurs dispositifs internes.
✔ Accompagner les managers dans la gestion des situations sensibles.
✔ Conduire des enquêtes internes fiables, impartiales et sécurisées juridiquement.
Nommer juste, c’est déjà agir.
Et c’est la première étape d’une politique RH crédible et protectrice.